L'atelier "Fonctions" animé par l'Académie de Toulouse

 

COMPTE-RENDU de l’atelier FONCTIONS animé par l’académie de Toulouse

Responsable : Danielle BLAU
Animateurs : Laurence KONIKOWSKI, Christiane LARCHIER, Huguette LARROQUE, Jean-Claude LINDAUER
Rapporteur : Jean-Claude LINDAUER

L’atelier a pour thème l’introduction de la notion de fonction dans le nouveau programme de la classe de troisième.

Un bref rappel historique permet de préciser que la notion de fonction est absente des manuels scolaires du XIXème siècle. Elle apparaît dans les programmes de 1902 conçue essentiellement comme une notion expérimentale. L’élève doit partir de la représentation graphique de la relation fonctionnelle, celle-ci pouvant être l’expression d’une loi physique déterminée expérimentalement.
La notion générale de fonction numérique est introduite explicitement en classe de troisième et est appliquée à l’étude de quelques relations fonctionnelles auxquelles conduisent –dit le programme de 1947- des problèmes empruntés à la géométrie et à la physique. Au lycée sera abordée l’étude analytique des fonctions.
Ce dispositif maintenu sans grands changements pendant des décennies est modifié sensiblement à l’époque des « maths modernes ».
Alors que les programmes antérieurs se fondaient sur l’expérience géométrique et physique pour introduire les notions fondamentales, les programmes réalisés entre 1969 et 1973 adoptent un point de vue beaucoup plus abstrait. 
Dès la classe de cinquième, les élèves étudient dans un cadre ensembliste les notions de graphe et d’application.
L’étude des fonctions numériques commence en classe de quatrième. Elle s’appuie sur une bonne connaissance des propriétés de R.
L’infléchissement est très sensible après 1977.
Les ambitions théoriques sont réduites surtout pour les jeunes élèves.
La notion d’application est introduite en cinquième de façon descriptive et la terminologie est réduite au minimum.
L’étude des applications linéaires et affines en classe de troisième repose principalement sur des représentations graphiques.
Le contraste entre la volonté d’être rigoureux et systématique, caractéristique de la réforme des maths modernes et la volonté d’être plus opératoire dans les programmes de 1995 est grand.
Les programmes de collège de 1997 en vigueur jusqu’à cette année réduisent l’étude des fonctions à la connaissance sans formalisme des fonctions linéaires et affines.
Ils sont prolongés en classe de seconde par une approche qui depuis le programme de 2000 donne à la courbe représentative un nouveau statut.

Les changements constatés dans le programme de troisième sont résumés dans le tableau joint en annexe « La notion de fonction dans les programmes de troisième de 1998 à 2008 ». 
Ces changements dans l’introduction des fonctions se justifient par :

  1. L’importance que revêt ce concept dans l’appréhension du monde.  Les fonctions sont exploitées dans des domaines variés (physique, linguistique, sciences cognitives, sociologie, économie…). Les fonctions sont un outil privilégié de modélisation.
  2. Le point de vue didactique qui précise que la notion de fonction s’exprime mathématiquement dans différents cadres : cadre algébrique (formule), cadre graphique (courbe), cadre numérique (tableau de valeurs). Cf travaux de Michèle ARTIGUE 1990.
    Dans la pratique de l’enseignement, même si ces cadres sont présents, même si leur intervention est explicitement sollicitée par les programmes, le cadre algébrique est le cadre dominant et c’est lui qui conditionne les conceptions qui se forment chez les élèves, pour qui une fonction tend inévitablement à se réduire à une formule
  3. Les représentations erronées des élèves de fin de collège qui limitent les fonctions aux fonctions linéaires et affines.

Les comparaisons des programmes de 1998 à 2008 appellent quelques remarques :

  1. Les fonctions linéaires et affines n’apparaissent que comme des cas particuliers.
  2. Le formalisme est plus affirmé.
  3. Les fonctions sont caractérisées par un processus décrit par un tableau de nombres (cadre numérique), une formule (cadre algébrique), une courbe (cadre graphique). Ces cadres sont complémentaires et aucun n’est exhaustif.

L’introduction de la notion de fonction est l’aboutissement de travaux dans les classes précédentes. Les expressions « est fonction de » ou « varie en fonction de » ont déjà été largement utilisées.

Le tableau joint en annexe « Construction de la notion de fonction au collège » 

 met en évidence la progressivité dans la construction de la notion. Le rôle spécifique de l’usage du tableur est souligné en quatrième et troisième.

En classe de troisième, la notion de fonction en tant que processus faisant correspondre à un nombre un autre nombre doit émerger progressivement d’exemples issus de situations concrètes.

L’atelier a proposé l’étude d’un exemple introductif «  L’aire de baignade » :

Enoncé :
 Activité :
  Un maître nageur dispose d’un cordon flottant de 340 m de longueur.
  Il veut délimiter un rectangle de manière à ce que l’aire de la baignade soit la plus grande possible.
Comment doit-il disposer le cordon ?

 « Petite histoire » : Cet exercice a été travaillé pour l’animation des journées pédagogiques sur les nouveaux programmes de 3ème en avril 2008. En liaison avec les collègues du Lycée, qui l’utilisent depuis un moment pour l’introduction de la notion de fonction en 2nde, nous nous sommes posé la question de savoir si nous pouvions l’utiliser aussi avec des élèves de collège pour l’introduction de cette même notion. Depuis, nous l’avons retrouvé dans certains manuels de 3ème soit en activité d’introduction (« Fonction et expression algébrique », un enclos pour un chien dans le triangle), soit en dernier exercice du chapitre (« Je cherche », dans le Phare).

Pourquoi l’avons-nous choisi en tant qu’activité d’introduction en classe?

  1. Il s’agit d’un problème dont la résolution vise la construction d’une nouvelle connaissance;
  2. Le problème est “consistant ”, c’est-à-dire qu’il présente une certaine “résistance”. Il ne donne pas lieu à une réponse qui résulte d’un traitement immédiatement reconnu...
  3. Donner un problème de recherche, c’est lancer un défi. Il est important que les élèves 
    «  fassent leur ” le problème et qu’ils aient envie de relever le défi.
  4. La validation de la solution est laissée le plus possible à la charge des élèves.

 

Questions posées au groupe :

  1. Avez-vous déjà pratiqué cette activité ? Quel est son intérêt pour l’introduction de la notion de fonction ?
  2. A votre avis, devant ce problème, quels sont les différentes réactions des élèves ? (voir suite diaporama + quelques traces manuscrites d’élèves).

En conclusion, il apparaît que : 


Cet exemple permet d’illustrer la complémentarité des différents cadres à envisager. (Travailler dans différents cadres est une consigne rappelée à plusieurs reprises dans le programme !). Il montre l’intérêt de l’introduction du concept de fonction pour aider à résoudre le problème. L’étude des différentes tentatives des élèves, même infructueuses, permet de travailler : conjecture, argumentation, preuve. 
Dans l’exercice :
le cadre numérique, par les calculs qu’il suggère, permet aux élèves de s’approprier la situation. L’approche expérimentale justifie la question posée sur l’existence éventuelle d’une aire maximale.
le tableau des valeurs obtenues justifie l’ébauche d’un graphique comme un mode de représentation. L’usage d’un tableur et la présentation dynamique de la représentation graphique correspondante  préfigure le passage au continu.
le cadre algébrique conduira à l’expression de l’aire dans le cas général pour modéliser la situation. C’est ce qui permettra la justification de l’existence du maximum cherché.

L’exploitation conjointe des différents cadres permet de faire apparaître une fonction comme un processus décrit soit par un tableau de nombres, soit par une formule, soit par une courbe.
La définition n’est pas exigible mais elle est appelée à fonctionner.
La notation correspondante apparaîtra alors nécessaire.

Question au groupe :


 « Avez-vous adopté d’autres types d’exercices pour l’introduction de cette notion ? »

.

Afin de donner du sens à ces différents aspects de la définition, ont été présentés des exemples d’introduction de fonctions privilégiant un cadre ou un autre.

Exemple 1 : Fonctions définies dans le cadre numérique
Présentation de l’activité relative à la mise en scène de boites noires associant le calcul mental.

Exemple 2 : Fonctions définies dans le cadre algébrique. Situation concrète issue de la sécurité routière. Lien avec les thèmes de convergence.
Distances de freinage sur route mouillée et sur route sèche fonctions de la vitesse définies par :
 et 

Exemple 3 : Fonctions définies dans le cadre graphique. Exemple d’abaque

.

Conclusion :

La présentation de ces exemples, met en évidence le fait :
-  qu’il n’y a pas de cadre à privilégier a priori, 
- qu’il faudrait donner des exemples de fonctions mais aussi de correspondances non fonctionnelles, ainsi que des exemples de cas discret ou de cas continu (ou « continu par morceaux »). 
C’est la complémentarité des approches qui conduit à donner du sens à la notion.
La formalisation attendue doit ensuite répondre à un besoin.

Sur ce thème des fonctions, il ne s’agit pas de mettre en opposition l’abstrait et le concret mais plutôt de faire évoluer le degré d’acceptabilité du concept. Il s’agit de le rendre assimilable et manipulable par les élèves.
L’objectif est d’assurer le réemploi du concept de fonction, de le rendre utilisable dans d’autres cadres, qu’il s’agisse d’autres disciplines ou de la vie courante. 
Le concept de fonction doit apparaître comme une aide à l’élaboration d’une pensée méthodique et inventive.

Ce changement dans le programme de troisième sur le thème des fonctions a un impact sur l’enseignement en classe de seconde. Il faut rappeler que les connaissances sur les fonctions ne font pas partie du socle de connaissances et de compétences et ne sont donc pas exigibles.
En revanche, elles font partie du programme de troisième et ont donc en ce sens déjà été présentées aux élèves. Il importe que les collègues de lycée en soient conscients.